De la Macronie à l’extrême-droite : combattre la grande coalition anti-populaire


Le parti-pris de Nos Révolutions, discuté le 13 janvier 2024.

Le 19 décembre dernier, l’élaboration puis le vote en commun de la loi immigration entre macronistes et LR, sur la base du programme lepéniste, n’est pas un fait anodin. A la faveur de la crise politique ouverte en 2022, le régime vient de connaître un basculement. L’extrême-droite lepéniste, jadis épouvantail de la Ve République, en devient une composante politique décisive. Comment comprendre cet événement, et qu’implique-t-il pour l’avenir ?

D’où vient la grande coalition anti-populaire ?

On sent bien, depuis le déclenchement de la guerre d’Ukraine puis de Gaza, depuis le déchaînement de puissants mouvements sociaux en France et en Europe, que les classes dirigeantes, hier acquises au libéralisme d’affichage progressiste, sont en train de changer d’options politiques.

À la faveur de l’agression russe en Ukraine et du retour en force de l’OTAN, LR et macronistes ont volé ensemble au secours de l’industrie militaire française. Face au mouvement des retraites, face aux émeutes de l’été, là aussi le parti de l’ordre a dû serrer les rangs ; même les lepénistes, théoriquement opposés aux 64 ans, n’ont pas protesté ou si peu, contre la brutalité gouvernementale.

Et après le déclenchement de la guerre de Gaza, Braun-Pivet, Larcher, Le Pen ont manifesté tous ensemble en soutien aux opérations de l’armée israélienne. Certains à gauche sont malheureusement tombés dans le piège, pensant par leur participation contribuer à la lutte contre l’antisémitisme. De fil en aiguille, les trois partis se retrouvent ainsi sur des positions et des actions communes sur la plupart des grands sujets – la plupart du temps, sur la base des thèses lepénistes. 

N’oublions pas que cette coagulation des forces anti-sociales – LREM, LR et RN – s’est faite en réaction à la montée du mouvement populaire : nouvelle vague féministe, Gilets Jaunes et réforme des retraites en 2019, luttes contre les violences policières en 2020, poussée de la gauche radicale en 2022 (au point que la NUPES arriva en tête du premier tour des élections législatives), à nouveau retraites et violences policières en 2023.

La violente contre offensive bourgeoise du second semestre 2023 leur a permis de reprendre la main, de fondre sur le mouvement social et de déséquilibrer politiquement la gauche. Voilà pourquoi ils ont tant d’injures aux lèvres : la gauche est antisémite ! Elle est woke ! Elle est islamiste ! Et voilà, aussi, pourquoi ils offrent de belles campagnes de promotion aux diviseurs de la NUPES. Ils se montrent féroces, comme le sont les bêtes blessées qui doivent tuer pour survivre. 

Dans ce contexte, cette nouvelle coalition a commencé à bâtir des éléments de programme commun : attaquer toutes les protections collectives du salariat, rétablir l’ordre en brutalisant les classes populaires, participer à la fuite en avant des nationalismes vers la guerre. Ces priorités s’incarnent d’ailleurs tout à fait dans le nouveau gouvernement Attal, qui penche très à droite et dont la mission proclamée est de “réarmer” le pays…

Comment la combattre ?

Si l’on considère que la loi Immigration et la préférence nationale qu’elle contient constituent un basculement historique, alors il est vital d’en tirer des conclusions pratiques ! Faute de quoi, aux traditionnels cris d’orfraie sur la “bête immonde” succéderont le retour des petites habitudes, et donc de l’accoutumance à la lepénisation des esprits. 

La Macronie s’est donc alignée sur le programme de l’extrême-droite. Cela change tout, pour les militant·es de la gauche et du progrès social. Le temps est plus que venu d’une rupture totale, y compris symbolique, du dialogue avec ce camp politique. Il n’est plus possible de prendre part aux simulacres républicains d’un gouvernement qui introduit les Manouchian au Panthéon tout en faisant voter la préférence nationale, insulte à leur mémoire. Les dirigeants de gauche qui ont cherché à négocier le contenu de la loi immigration avec les macronistes, pendant et à la suite de la réforme des retraites – et qui pour certains continuent de le faire malgré le vote de ces lois – sont coupables d’une faute politique lourde.

De la même manière en 2027, pour des millions de Français·es “faire barrage” au second tour de la présidentielle ne sera plus une option. Après le vote de la loi Immigration, en quoi le macronisme pourrait-il protéger du lepénisme ? Non, il n’existe plus qu’une alternative à l’extrême-droite, c’est la conquête du pouvoir par le peuple. Ces trois prochaines années, seule une direction radicale et combative, résolue à vaincre et capable d’expliquer comment y parvenir, peut convaincre des millions de femmes et d’hommes de consentir aux sacrifices de la lutte. Le redéploiement de la NUPES doit servir ces objectifs. Nous voulons y contribuer.

Car d’ici-là, de leur côté, les différents partis de cette coalition (LR, RN et macronistes) vont concourir aux différentes élections les uns contre les autres, vont donc polémiquer les uns avec les autres, avec des programmes aux nuances diverses mais tirant tous de plus en plus à droite. Dans ce contexte, dès les élections européennes il faut dénoncer le caractère conservateur et nationaliste du programme macroniste, mais aussi le caractère libéral et anti-populaire du programme de Le Pen, en encourageant la prise de conscience populaire qu’il s’agit de la même coalition tournée contre le peuple.

Nous appelons aux marches du 21 janvier, et publions à cette occasion un tract, mis à disposition de tous :

Signataires :
Josselin Aubry
Chloé Beignon
Zakaria Bendali
Aurélie Biancarelli
Hugo Blossier
Hadrien Bortot
Sophie Bournot
Marie-Pierre Boursier
Paul Calmels
Lucie Champenois
Maxime Chazot
Juan Francisco Cohu
Nicolas Defoor
Manel D.
Rosa Drif
Anaïs Fley
Théo Froger
Nadine Garcia
Grégory Geminel
Laureen Genthon
Nina Goualier
Antoine Guerreiro
Nicolas Haincourt
Robert Injey
Marie Jay
Gala Kabbaj
Noâm Korchi
Patrice Leclerc
Amélie Marissal
Colette
Nuria Moraga
Frank Mouly
Martine Nativi
Basile Noël
Philippe Pellegrini
Hugo Pompougnac
Stéphane Poulet
Katia Ruiz-Berrocal
Lydia Samarbakhsh
Bradley Smith
Laurène Thibault
Armeline Videcoq-Bard


Image d’illustration : « Emmanuel Macron et Marine Le Pen » en avril 2017, sur Wikimedia Commons (CC BY-SA 4.0)


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