Appel international à une action de solidarité immédiate envers la lutte des ouvrier·es du textile bangladais


Lettre publiée le 8 novembre 2023 par Maria Ferdawsi, secrétaire aux affaires internationales de la Centrale syndicale des ouvriers du textile du Bangladesh. Traduction Marie Jay.

Des ouvrier·es du textile bangladais conduisent depuis plusieurs années des luttes exemplaires dans des conditions très difficiles pour un salaire minimum : 230 $ (dollars américains) par mois. Récemment encore, ils se sont mobilisés, ont fait grève et ont lancé un appel international à la solidarité. Nous rejoignons leur appel à une solidarité internationale en publiant leur texte.

Mouvement pour le salaire minimum : 230 $ [dollars américains] par mois – Appel international à une action de solidarité immédiate envers la lutte des ouvriers du textile bangladais

« La Centrale syndicale des ouvriers du textile (GWTUC), qui représente les intérêts de plus de 5 millions d’ouvriers du textile au Bangladesh, est un important fournisseur mondial de vêtements.

Elle a appelé toutes les parties prenantes de l’industrie textile, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, ainsi que le gouvernement, à tenir compte des demandes du mouvement en cours pour un salaire mensuel minimum de 25 000 Taka (230 dollars américains). Ce salaire a stagné à 8 000 Taka (73 dollars américains) durant les 5 dernières années.

En soutien au mouvement pour l’augmentation des salaires des ouvriers au Bangladesh, la GWTUC appelle les travailleurs du monde entier et les opprimés à s’unir contre les propriétaires qui répriment le mouvement et contre leur gouvernement. Au cours de manifestations pacifiques, le gouvernement a eu recours à la violence. Bien qu’étant le principal fournisseur de vêtements au monde, les travailleurs de l’industrie textile du Bangladesh reçoivent les plus faibles salaires. Les acheteurs internationaux et les multinationales de cette industrie doivent en être tenus responsables. Simultanément, la GWTUC appelle le gouvernement autocratique du Bangladesh à mettre fin à ses violations des droits humains, à la surveillance opérée via les téléphones portables et les réseaux sociaux, aux meurtres de civils, et aux poursuites judiciaires truquées contre les leaders syndicaux. Le monde doit dénoncer ces injustices, et GWTUC est le symbole de cette lutte.

Les salaires actuels rendent presque impossible aux ouvriers de boucler les fins de mois, et toutes les parties-prenantes, y compris les propriétaires d’entreprises locales, les marques de prêt-à-porter internationales, et tous les bénéficiaires de cette chaîne d’approvisionnement, devraient adopter une posture humaine, sensible pour sauvegarder la vie de ces travailleurs qui font tourner l’industrie du vêtement.

Le Bangladesh est classé comme le deuxième plus grand fournisseur de textile mondial, avec des marques importantes qui y font fabriquer leurs vêtements, comme Adidas, Gap, Calvin Klein, H&M, Giorgio Armani, Ralph Lauren, Hugo Boss, Nike ou encore Tommy Hilfiger. Pourtant, les travailleurs bangladais reçoivent les plus faibles salaires de la profession à l’international.

Les ouvriers le demandaient au gouvernement depuis presque 3 ans, et ils mettent désormais en place des actions pour augmenter leurs salaires. La dernière mobilisation a éclaté quand les patrons ont proposé un salaire minimum de seulement 10 400 Taka.

Les mobilisations pour un salaire minimum plus élevé ont commencé le 23 octobre, quand il a été révélé que les salaires augmenteraient seulement à 10 400 Taka par mois, à partir de décembre. Comme par le passé, les mobilisations ont mené à des confrontations avec la police et avec des hooligans affiliés au parti gouvernemental.

Dans trois zones industrielles différentes, la police utilise la force pour empêcher les mobilisations énergiques des ouvriers. Ils arrêtent des centaines de travailleurs et montent des plaintes truquées contre des milliers de travailleurs, dont des leaders syndicaux.

Pour le moment, au moins 5 travailleurs ont été tués par la police et sous la torture des hooligans du parti gouvernemental. L’un d’entre eux, Rasel Hawladar, a été abattu à bout portant et est décédé le 30 octobre. Le même jour, un travailleur qui s’appelait Imran est mort dans un incendie. Ces mobilisations se sont maintenant répandus dans différentes zones industrielles, et la violence et l’oppression continue. Des travailleurs ont déclaré la grève et ont cessé de travailler dans les usines. Ne pouvant pas les forcer à reprendre le travail, les patrons des usines essaient maintenant de négocier avec les représentants des travailleurs, dont ceux qui sont issus de la GWTUC.

Au milieu de tout cela, le 8 novembre, le gouvernement a proposé un salaire minimum à 12 500 Taka pour les travailleurs. Ces derniers ont rejeté cette proposition et annoncé la poursuite du mouvement. Les ouvriers refusent de retourner travailler pour le salaire qui est proposé. En réponse, le parti gouvernemental et les patrons d’usine menacent, ensemble, les leaders syndicaux locaux, laissant entendre qu’ils pourraient être arrêtés et emprisonnés si la grève continue. Le 8 novembre, la police a tiré sur un rassemblement de travailleurs et a tué une autre ouvrière, Anjuara Khatun.

D’un côté, le gouvernement est en discussion avec la GWTUC. De l’autre côté, de nombreuses accusations mensongères sont rapidement engagées contre les premiers dirigeants de la GWTUC, notamment contre son Vice-Président Joly Talukdar, son secrétaire général Sadekur Rahman Shamim et son secrétaire général adjoint Monzur Moin. Le système judiciaire n’étant absolument pas indépendant du gouvernement dans la gouvernance actuelle du pays, la GWTUC appelle la communauté internationale à se mobiliser contre l’emprisonnement injuste des premiers dirigeants syndicaux, qui a lieu à nouveau, et sur une longue durée. De plus, la GWTUC demande à la classe ouvrière française d’élever la voix pour protester contre les actions du gouvernement français, qui sert le gouvernement autocratique du Bangladesh en lui donnant des technologies de surveillance agressive qui sont utilisées de manière barbare contre les militants des droits humains, les syndicalistes et le mouvement démocratique. La GWTUC demande au peuple du monde entier de rejoindre cette cause. 

Les ouvriers du textile bangladais demandent un salaire minimum mensuel de 25 000 Taka et se battent contre les patrons d’usine. Bien que faisant face à des atrocités, le mouvement continue. Nous appelons tous nos syndicats frères à se mobiliser en solidarité avec le mouvement en cours des ouvriers bangladais.

Travailleurs de tous les pays, unissez-vous ! Longue vie à l’internationalisme et à la solidarité !

Merci

Maria Ferdawsi
Secrétaire aux affaires internationales
Centrale syndicale des ouvriers du textile, Bangladesh »


Image d’illustration : Ouvrières syndiquées à Gazipur au Bangladesh, par Solidarity Center (CC BY 2.0)


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