Par Hadrien Bortot.
Nous vous devons des excuses : depuis mercredi, nous attendions la nomination d’un Premier ministre pour publier l’édito hebdomadaire de Nos Révolutions. Cette nomination est finalement intervenue, sans surprise, 72 heures après la date prévue !
Emmanuel Macron a mis 72 heures pour désigner comme Premier ministre son premier soutien, le dernier des macronistes François Bayrou. L’extrême centre dispose donc désormais de son chef de gouvernement. François Bayrou est un homme de droite, le dernier représentant de l’UDF. Si Macron avait pu nommer Giscard, peut-être l’aurait-il fait ! Bayrou a été comme ministre de l’éducation nationale l’un des principaux défenseurs de l’école privée.
Il aura aussi été compromis dans l’affaire des assistants parlementaires du Mouvement démocrate au Parlement européen – version artisanale et centriste de l’affaire qui inquiète aujourd’hui Marine Le Pen – qui l’aura contraint à la démission du ministère de la Justice. Bayrou est l’expression de la situation de blocage politique et idéologique dans laquelle se trouve Macron. En France, There is no alternative au macronisme !
Depuis la censure de la semaine dernière, une partie de la gauche se fourvoie dans l’illusion d’un dialogue possible avec le macronisme. Or, le macronisme n’est pas raisonnable, il n’est ni négociable, ni discutable. C’est un projet politique qui brise des vies et se consacre entièrement à la défense des intérêts du capital et des plus riches. C’est une politique au service de l’argent, avec pour programme la destruction des services publics et la privatisation des biens communs afin d’engranger davantage de profits. Bayrou servira parfaitement ce projet !
Prenons l’exemple du déremboursement des médicaments. Cette mesure n’est pas une simple politique d’économie ; il s’agit d’un transfert de l’assurance santé publique, représentée par la Sécurité sociale, vers les mutuelles privées. Cette logique s’applique à l’ensemble des services publics, qu’il s’agisse de l’école ou de la sécurité.
Dans ces conditions, comment imaginer une quelconque collaboration avec ce système ? La gauche devrait porter un appel clair à une 6ème République et à la fin du présidentialisme. Mais pour cela, elle doit elle-même cesser de focaliser son discours sur la seule présidence. Le problème, ce n’est pas seulement Macron, mais le monde qu’il incarne, le système qu’il sert et les intérêts qu’il défend. Sa démission, à elle seule, ne suffirait pas à résoudre le problème.
Le moment politique est aussi marqué par la montée d’une petite musique fascisante. On entend dire qu’il faudrait un pouvoir politique plus fort face au chaos ! C’est faux. Ce qu’il faut, c’est plus de politique, c’est-à-dire plus de commun, plus de pouvoir collectif. Voilà le projet qu’il faut défendre et mener, car il est à l’opposé des solutions fascistes qui, malheureusement, semblent de plus en plus désirables aux yeux de nombreux concitoyens. La démocratie partout et tout le temps, dans la rue, comme dans l’entreprise.
Voilà pourquoi la gauche doit appeler au renversement des institutions, à la prise de pouvoir populaire, en un mot : à la révolution. Le jeu auquel s’adonnent les directions de plusieurs partis – Parti communiste, Parti socialiste, écologiste – en quête permanente de respectabilité bourgeoise, est vain. Le moment n’est pas venu d’éviter le chaos. Le chaos est là, c’est la macronie.
Il n’y a pas d’accord de non-censure possible avec celles et ceux qui garantissent l’ordre social et la rentabilité du capital. S’engager dans cette voie, c’est nier le problème institutionnel qui se pose devant nous. C’est faire croire que la démocratie représentative, telle qu’elle existe aujourd’hui, a encore un avenir ! Il faut donc engager dès maintenant une nouvelle étape, décisive, de la bataille pour la 6ème République.
Image d’illustration : Image générée par intelligence artificielle