Ce texte est issu d’une intervention prononcée lors des Journées de Mauprévoir, du 15 au 17 août 2025. Gilles Candar est historien et président de la Société d’Études Jaurésiennes (SEJ).
Le socialisme municipal occupe en France une place particulière qui n’a pas d’équivalent dans les pays comparables. Il n’est pas seulement un phénomène qui a duré, qui continue et constitue toujours, à l’heure actuelle, un élément essentiel de la vie politique nationale. Il s’est lové au cœur de nos pratiques et controverses politiques pour écrire une histoire un peu décalée, autre, que celle du socialisme comme doctrine ou organisation, et, en compagnie du communisme municipal qui en est à la fois un cas particulier et une proposition alternative et irréductible, une invitation à interpeller notre compréhension de l’histoire politique générale.
Il a été l’objet de nombreuses études et approches. Citons notamment parmi les politistes Michel Offerlé1, Frédérick Sawicki2 ou Rémy Lefebvre3. Parmi les historiens, dans le sillage de Maurice Agulhon4, il faudrait citer au moins Madeleine Rebérioux5, Jacques Girault et Emmanuel Bellanger pour les communistes6, Jacqueline Lalouette pour la mouvance laïque et notamment libre-penseuse7, mais d’abord Patrizia Dogliani8, référence essentielle sur le sujet et entre autres pour cette communication, puis, pour la période suivante, Aude Chamouard9. Et bien sûr prendre en compte toutes les monographies, biographies et études particulières diverses.
Une politisation à l’échelon communal
En France, l’échelon communal joue un rôle essentiel dans les luttes politiques, que l’on se place dans une perspective révolutionnaire allant de la Commune de la période de la Grande Révolution (1789-1795) à la Commune de Paris (1871) vue comme annonciatrice des grandes révolutions sociales du siècle suivant ou que l’on demeure dans une histoire de la longue politisation et acculturation démocratique du pays.
La loi Guizot (21 mars 1831) suit de près de la révolution de Juillet. Certes, elle maintient un suffrage très censitaire et la nomination des maires par les préfets. Mais les maires doivent être choisis au sein du conseil municipal ce qui limite l’arbitraire préfectoral et permet d’envisager l’éviction d’un maire impopulaire à la suite d’un échec électoral. En outre, la loi élargit considérablement le corps électoral, non seulement par rapport à la situation antérieure, mais aussi par rapport aux élections parlementaires : il faut un minimum de 10% qui peut aller jusqu’à 15% des hommes adultes de la commune pour constituer l’électorat. Celui-ci représente donc un million de personnes, c’est-à-dire cinq fois plus que le corps électoral parlementaire, ce qui contribue progressivement, comme l’indique Maurice Agulhon, à généraliser et à populariser le débat électoral au moment des élections locales.
La République permet une nouvelle et très forte avancée avec la loi Waldeck-Rousseau du 5 avril 1884, une des grandes lois qui marque l’établissement d’une République gérée par des républicains. Les maires sont désormais élus par les conseils municipaux comme cela avait été décidé dès 1882. Les conseillers continuent à être élus au Suffrage universel (dans l’acception de l’époque : suffrage masculin) et surtout les communes obtiennent une clause générale de compétence. Bien entendu, cette mesure prise au nom des principes libéraux et démocratiques est à la fois essentielle, fondamentale et d’application très contrôlée : Paris est exclu du droit commun car les souvenirs de la Commune, et de ses divers précédents, est encore trop vif et récent, la tutelle préfectorale veille à ce que l’esprit séditieux ou simplement déraisonnable ne puisse prospérer nulle part.
Les fondateurs de la République sont des hommes d’État soucieux de placer hors d’atteinte des menées révolutionnaires les principes républicaines. Un de leurs principaux représentants, Jules Ferry, qui fut en 1870-1871 le dernier maire de Paris, renversé par la Commune, président du Conseil au moment du vote de cette loi, l’explique sans se dissimuler : « la République doit être un gouvernement » (Bordeaux, 30 août 1885), et, au besoin, « S’il faut faire des lois de fer, nous savons les faire et nous les avons faites » (Sénat, 2 février 1891). Cela restera fondamentalement la caractéristique du pouvoir républicain pendant un siècle et demi : principes libéraux et démocratiques (le plus souvent) tempérés par une vigilance étatique, la dialectique normale entre droite et gauche consistant à desserrer ou au contraire resserrer celle-ci, les réalités du rapport de forces donnant assez logiquement le plus souvent l’avantage aux tenants d’un ordre bourgeois.
Le retour des socialistes par les mairies
Question de doctrines et de débats dans les années 1840, symbole de craintes et d’espoirs sociaux en 1848 et à la fin de l’Empire, associé à la Commune et proscrit depuis, le socialisme redevient une force non par la seule voie municipale, mais en grande partie grâce à elle. La complexité et la spécificité nationale tient beaucoup au fait que ce retour est à la fois permis et lié à la victoire républicaine sans se confondre et s’identifier en tous points avec elle. La victoire républicaine se traduit par une loi d’amnistie et le retour d’exil ou du bagne des communards, par la liberté de presse, de réunion et d’élection, même par celle de former des syndicats. Toutes ces mesures s’inscrivent dans un vaste dispositif législatif voté entre 1897 et 1885. Les forces politiques et sociales sont à la fois à la pointe du mouvement républicain et en conflit ouvert avec sa politique courante comme avec ses dirigeants10.
Socialement, le mouvement socialiste s’affirme à nouveau avec des conflits sociaux, des grèves en principe légalisées depuis 1864, des syndicats qui ne le seront qu’en 1884. Politiquement c’est le cas avec des participations aux campagnes électorales législatives, parfois de manière frontale (diverses candidatures de Blanqui, emprisonné, jusqu’à son élection en avril 1879, invalidée ensuite, à Bordeaux). Au printemps 1886, parfois dans la continuité d’un radicalisme républicain d’extrême-gauche parlementaire (élection de Clovis Hugues à Marseille, socialiste déclaré, dans le quartier de La-Belle-de-Mai en août 1881). Un premier groupe ouvrier favorable à « la nationalisation progressive de la propriété » et à la transformation des monopoles en « services publics gérés par les corporations sous le contrôle de l’administration publique » se constitue à la Chambre autour d’Antide Boyer.
Mais les conquêtes municipales surprennent et apparaissent comme des gages de grands changements à venir, que cela inquiète ou soulève l’espérance. La ville minière de Commentry (Allier) passe ainsi pour avoir élu, le 4 juin 1882, la première municipalité socialiste du monde. Discrète encore en 1884 et 1888, la présence socialiste s’affirme et change de dimension avec d’éclatants succès aux élections de 1892 et de 1896. De très grandes villes comme Lille, Roubaix, Marseille, Toulon, Limoges, Roanne, Calais ou Sète élisent des maires socialistes. Ces succès servent de base à la construction d’une grande organisation politique qui transcenderait les groupes, clubs et partis existants pour renouer avec l’ambition de l’Association internationale des travailleurs à la fin des années 1860.
Cette situation est originale alors que dans de nombreux autres pays, le parti se constituera en s’appuyant sur les syndicats ou sur des scrutins à portée nationale. Elle se représente à elle-même ses succès dans une grande fête, le « Banquet des municipalités socialistes », qui se tient le 30 mai 1896 à La Porte Dorée (mais la réunion est souvent connue sous le nom de la localité voisine : Saint-Mandé). Jaurès, Guesde, Vaillant et d’autres prononcent des discours. Alexandre Millerand notamment, à la fois figure de proue du socialisme parlementaire et hôte de la réunion comme député de Bercy, prononce un discours essentiel pour la définition du socialisme républicain. Il dégage trois axes fondamentaux : appropriation collective des moyens de production et d’échanges, conquête électorale des pouvoirs publics, entente internationale et récusation des nationalismes qui vont longtemps constituer le fonds commun de la gauche en France. Le souvenir en a été estompé depuis en raison de l’évolution politique ultérieure de Millerand, ministre, président du Conseil puis de la République de plus en plus marqué à droite. Mais en 1896, Millerand est accepté par Guesde, approuvé par Jaurès et très lié à Vaillant.
Ancien membre de la Commune de Paris, Édouard Vaillant est alors le personnage-clef du socialisme municipal. Lui-même n’exercera jamais les fonctions de maire, mais il est conseiller municipal du quartier du Père-Lachaise (20e arrondissement de Paris) de 1884 à 1893, et surtout l’initiateur, le formateur, l’animateur de l’action municipale du socialisme dans tout le pays et notamment dans la Seine et dans le Berry où il exerce une influence déterminante. Il incarne bien le double mouvement du socialisme d’alors : à la fois entretenant le souvenir révolutionnaire de la Commune et engagé dans une action de défense et de transformations quotidiennes à tous les échelons du pays, candidat de « l’autonomie communale » aux élections municipales de 1884 et leader du blanquiste Comité Révolutionnaire Central.
À partir de 1892, il organise la première Fédération des élus socialistes, ancêtre des actuelles FNESR et ANECR qu’il voudrait la plus rassembleuse possible. Ce n’est pas si facile et s’il y parvient plutôt avec les élus « allemanistes »11 du Parti Ouvrier Socialiste Révolutionnaire (POSR), il éprouve plus de difficultés avec les élus aux lisières du socialisme indépendant ou de la gauche radicale-socialiste. Les rapports sont souvent compliqués avec les guesdistes du Parti Ouvrier Français, adeptes de l’union mais enclins à vouloir diriger fermement celle-ci qui organisent leur propre Fédération d’élus après les élections municipales de 1896. En principe, le rapprochement entre ces deux branches du mouvement socialiste, qui aboutit à une fusion de principe fin 1901-1902, puis la réalisation de l’unité socialiste (avril 1905) mettent fin à toute concurrence. De toute façon, reconnaissons qu’il s’agit davantage d’ébauches et de déclarations de principes que de véritables réalisations pour toute la période d’avant-guerre.
Programmes et réalisations
Ces premières municipalités socialistes vont de la très grande ville aux villages. La banlieue n’est pas encore vraiment pensée comme telle, et de toute façon elle serait plutôt associée à un espace modéré ou conservateur. Historiquement, les contingents de la Garde nationale issus de la banlieue, comme les élus la représentant au sein du Conseil général de la Seine sont des adversaires du camp progressiste. La ceinture rouge autour de Paris ne pourra se constituer qu’à partir des élections municipales de 1912, et plus encore évidemment dans l’entre-deux-guerres, d’autant que les communistes prendront nettement l’ascendant sur les socialistes en région parisienne.
Rares sont les cas où les socialistes peuvent administrer seuls les municipalités conquises. L’élection municipale est un facteur important d’accoutumance aux listes d’union, républicaine ou d’action sociale, bref « de gauche ». Le paradoxe, peut-être apparent, est que la nécessité ou l’intérêt de l’union, se pose aux socialistes de toutes tendances ou de toutes obédiences doctrinales ou organisationnelles. Même les plus à gauche, ou critiques envers la politique républicaine des gouvernants « opportunistes » ou « modérés » comme de l’opposition radicale, les guesdistes ou les néo-blanquistes sont amenés à se poser la question et à y répondre le plus souvent favorablement. Ainsi, à Lille, le chef régional du Parti Ouvrier, Gustave Delory, doit s’entendre avec le docteur Charles Debierre, tête de file des radicaux, pour prendre la mairie, ce qu’il réussit à faire entre 1896 et 1904 comme après 1919. La controverse politique se joue ensuite souvent pour savoir si de telles alliances relèvent de la « discipline républicaine » ou de « l’intérêt de classe », mais concrètement il n’existe guère de différences entre leurs traductions politiques possibles.
Les socialistes pratiquent d’abord une politique sociale. Le soutien aux plus pauvres, et notamment aux femmes, enfants et vieillards, est clairement affiché. La mise en œuvre commence par des distributions de nourriture ou de vêtements, par l’organisation d’une assistance médicale qui peut aller jusqu’à l’ouverture d’une pharmacie municipale, de centres de soin ou de crèches. Cette politique sociale rejoint les préoccupations hygiénistes qui s’affirment chez les républicains, mais aussi dans d’autres secteurs politiques, et qui plaisent pour des actions de désinfection ou de dératisation, l’ouverture de bains-douches. Au Conseil municipal de Paris, Vaillant intervient régulièrement pour la construction d’urinoirs de rue.
Mais la spécificité socialiste est d’insister sur cette politique en incluant une remise en cause des droits sacro-saints de la propriété individuelle. C’est ce qui se joue notamment au cours de la préparation et du vote de la loi de protection de la santé publique du 15 février 1902 qui prévoit, outre la première vaccination nationale obligatoire contre la variole, la mise en place de codes sanitaires communaux et donne plus de pouvoirs aux maires. Il n’est pas indifférent qu’il s’agisse d’une nouvelle loi Waldeck-Rousseau, ce dernier menant alors un gouvernement de « défense républicaine » (1899-1902) qui initie un certain nombre de mesures sociales après une bonne décennie de stagnation conservatrice et répressive. Il ne s’agit certes pas de menacer ce que certains pourraient appeler l’ordre bourgeois, mais sans doute de lui permettre de se maintenir en acceptant un certain nombre de réformes, sans doute limitées, mais que les socialistes comptent bien élargir et utiliser pour obtenir des transformations plus profondes.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les municipalités socialistes posent peu au départ la question du logement. Celui-ci est souvent perçu à travers le seul prisme de la question du loyer qui met aux prises le locataire contre le propriétaire, individuel ou collectif, « Monsieur Vautour »12. La législation républicaine sur la construction de logements sociaux est assez tardive, émanant d’ailleurs plutôt de républicains modérés : lois Jules Siegfried (1894), Paul Strauss (1906), Laurent Bonnevay (1912). Les socialistes ne tarderont pas à s’en emparer et à proposer de plus amples réalisations, mais ils ne les auront guère devancées.
En revanche, les socialistes se montrent d’emblée très actifs sur le front scolaire. Les réserves théoriques à l’égard de la politique ferryste semblent plutôt réservées à la presse. Dans la pratique, les socialistes participent à l’effort scolaire au même titre que les autres forces républicaines. L’élection d’une municipalité ouvrière et socialiste à Carmaux (1892) est d’abord motivée par la volonté d’avoir une école publique et laïque dans le quartier ouvrier, non une école confessionnelle. Simplement, les socialistes insistent peut-être davantage sur l’organisation de cantines et l’ouverture d’écoles professionnelles.
Ils complètent cet effort par une politique très active de transformation des noms et des références de l’espace urbain : laïcisation des noms des voies publiques au profit de penseurs ou de militants de la cause progressiste, encouragement aux bibliothèques et aux spectacles (théâtre, musique, chansons) susceptibles de participer à cet éveil mobilisateur du peuple.
En revanche, longtemps associé à une thématique de préparation militaire, ou de loisirs aristocratiques, le sport est délaissé et dans la pratique plus souvent pris en charge par des organisations catholiques ou nationalistes. C’est assez tardivement que les socialistes essaient de rattraper leur retard, en prenant conscience de la popularité des activités sportives auprès des jeunes y compris en milieux populaires : journaliste à L’Humanité, Abraham Kleynhoff lance en 1907 avec beaucoup de difficultés et peu de soutiens une Union sportive du Parti Socialiste à l’origine de l’actuelle Fédération sportive et gymnique du travail. Ce n’est qu’après la Grande Guerre toutefois que se déploie vraiment – mais alors très largement – au sein des municipalités ouvrières une politique sportive.
Bien entendu, la gestion a aussi des effets politiques. Elle oblige groupes et militants différents à travailler ensemble. C’est aussi comme cela que se construit progressivement l’unité socialiste, processus long et compliqué, qui trouve son aboutissement en avril 1905 au congrès de la salle du Globe à Paris avec la création du Parti Socialiste (Section française de l’Internationale Ouvrière). Elle est aussi une pédagogie de l’action politique, un des éléments importants qui doivent habituer les militants à une future société socialiste selon Jaurès. Elle s’inscrit aussi dans le processus d’acceptation de l’impôt par les socialistes13. Au début, ils souhaitent baisser les taxes sur les marchandises payées à l’octroi. Mais leurs politiques nécessitent des recettes et ainsi se construit aussi peu à peu l’acceptation sociale à l’impôt, dès lors qu’il est équitable, donc progressif, et que l’emploi des recettes soit visible, compréhensible et expliqué. Pour la gestion des services communaux, le principe de la régie directe se généralise dans les municipalités gérées ou largement influencées par les socialistes.
Une bataille de principes
Pendant deux à trois décennies, le socialisme municipal est le sujet de controverses doctrinales. Les premières candidatures des années 1880 s’accompagnent de prises de position, d’essais et d’articles qui souhaitent dégager un corps de doctrine cohérent14. Un certain nombre de références sont régulièrement citées, notamment les brochures de Benoît Malon, Le nouveau parti15 et de Paul Brousse, La propriété collective et les services publics16 qui soutiennent que « la question communale est plus de la moitié de la question sociale », ou les diverses candidatures et programmes de Jules Joffrin dans le 18e arrondissement de Paris17. Ils s’inspirent beaucoup de César de Paepe, socialiste belge auteur d’un rapport sur l’organisation des services publics lors d’un ultime congrès de l’Association internationale des travailleurs à Bruxelles (1874)18. Tous sont soutenus et leurs travaux popularisés dans les cercles militants ou savants par La Revue socialiste de Benoît Malon, à la parution régulière depuis 1885. Le socialisme est défini comme reposant sur l’organisation de services publics chargés de produire et de distribuer des objets de première nécessité. Ils concernent notamment l’eau et le gaz, puis l’électricité.
Ces analyses provoquent bien des controverses de presse, entre Le Socialiste guesdiste et Le Prolétaire broussiste notamment. Pour les guesdistes, la question essentielle est celle de l’appropriation collective des moyens de production et d’échanges, non la mise en place de services publics. La conquête des municipalités sert de prélude à une bataille politique d’ensemble, à la conquête des pouvoirs publics. « Il n’y a pas de socialisme municipal » martèle Guesde aussi souvent qu’il le peut. Il n’empêche. Les guesdistes prenant part aux batailles électorales sont amenés à se poser la question des gestions municipales et à mettre en valeur la qualité des politiques menées. La pente est d’autant plus aisée à emprunter que des socialistes des divers groupes peuvent être élus ensemble, sur une même liste ou non, et sont donc amenés à s’opposer ensemble, ce qui peut déjà demander un début de coordination, voire à gérer ensemble en cas de victoire.
Tous les conseillers ne sont pas nécessairement inscrits dans un socialisme étroitement défini et beaucoup se trouvent influencés par les plus actifs de leurs leaders : Jaurès à la Chambre des députés pour la politique nationale et Vaillant comme praticien puis inspirateur des politiques locales, appelant à renforcer les liens avec les syndicats locaux et les Bourses du travail. C’est ainsi que s’impose peu à peu un « socialisme municipal » discret, qui évite les empoignades idéologiques des congrès pour se poser des problèmes d’application concrète des principes.
La controverse doctrinale au congrès de Saint-Quentin (16-19 avril 1911) oppose une nouvelle fois les guesdistes aux tenants d’un nouveau réformisme : Edgard Milhaud, professeur à l’université de Genève, directeur de la revue internationale Annales de la régie directe (1908-1923), comme Albert Thomas, conseiller municipal puis maire de Champigny-sur-Marne avant de devenir un personnage-clef du réformisme social19. Elle nourrit la réflexion militante, sans déboucher sur des conclusions politiques particulières. La période est marquée par une vitalité de recherche qui entend fonder en raison l’activité des socialistes. Un groupe de normaliens lié à de jeunes militants, parmi lesquels figurent quelques futurs intellectuels majeurs du siècle, mènent une réflexion qui s’expose dans les brochures des Cahiers du Socialiste : La politique foncière des municipalités par Maurice Halbwachs, L’organisation économique des communes par Henri Lévy-Bruhl, Le socialisme municipal. La leçon de l’étranger, par Louis Gernet (sous le pseudonyme de Louis Garnier), Les régies municipales et le socialisme par Edgard Milhaud, L’assistance et les communes par André Bianconi, Espaces libres et fortifications par Albert Thomas20, etc. Ce bel effort ne sert guère pour les élections municipales de 1908 qui sont médiocres, voire mauvaises pour les socialistes pourtant partis confiants en raison de leur unification récente et des difficultés du gouvernement radical en place (Clemenceau), mais il est permis de penser qu’il infuse progressivement et nourrit les équipes à venir. Les élections de 1912 voient d’ailleurs la première formation de ce qu’on appellera plus tard la ceinture rouge autour de Paris, avec de nombreux succès en banlieue.
La force apparemment tranquille du socialisme municipal
De fait, le socialisme municipal monte progressivement en puissance, avec une relative discrétion dans les commentaires nationaux et même au sein de son historiographie. En 1912 donc, les élections se déroulent dans une atmosphère plus sereine que les précédentes, sous un gouvernement modéré (Poincaré) plutôt ouvert sur les questions sociales, avec un ministre du Travail Léon Bourgeois qui parvient à faire abaisser à 60 ans l’âge possible de départ à la retraite malgré l’opposition du Sénat. Elles sont plutôt favorables aux socialistes (Toulouse, Limoges et Roubaix repris, perte de Marseille, mais nombreux gains dans les petites et moyennes villes) et pendant la Guerre les politiques de solidarité mises en place se révèlent plutôt consensuelles.
Fin 1919, les élections législatives polarisent l’attention : forts de leur unité retrouvée et d’un essor militant incontestable (adhérents, diffusion de la presse…), les socialistes s’attendent à une forte progression. Or, celle-ci est en voix très limitée et surtout leur isolement politique les conduit à la perte de près d’un tiers de leurs sièges. La spirale de l’échec et des divergences sur la ligne à adopter va bientôt conduire à la scission de Tours, à la formation des deux partis rivaux (SFIO et SFIC) et à la réplique de la scission syndicale (CGT et CGTU). Les municipales qui suivent à deux ou trois semaines près passent donc plutôt inaperçues. Or, elles voient les socialistes doubler le nombre de leurs mairies, sans même que les intéressés commentent particulièrement cette nouvelle donne lors de leurs congrès nationaux (Strasbourg puis Tours en 1920) marqués par d’intenses controverses idéologiques.
Le communisme municipal qui s’affirme dès 1925 et connaîtra de grands succès en 1935 se développe sous le contrôle d’un parti soucieux d’éviter tout risque de réformisme et de privilégier des victoires politiques nationales. Sa gestion doit être exemplaire et mobilisatrice. Un réseau influent se met progressivement en place autour de Georges Marrane, maire d’Ivry (1925-1965), secrétaire de la Fédération des municipalités ouvrières et paysannes (1931), très actif dans de nombreux syndicats intercommunaux et commissions diverses dès les années 193021. Quartiers populaires22 et banlieues, campagnes avancées des pourtours du Massif Central, rivalisent pour donner à voir une France ouvrière et paysanne préparant un avenir radieux dès que la victoire globale aura été obtenue.
De son côté, la SFIO ne met pas trop en avant sa force municipale. Elle gère pourtant de nombreuses villes, avec un apogée atteint en 1935 (1375 mairies revendiquées), mais elle n’en fait guère un sujet de débat lors de ses assises. Pourtant, sa fédération d’élus fonctionne désormais de manière régulière sous l’impulsion d’un ancien disciple de Vaillant, Henri Sellier23, maire de Suresnes et surtout longtemps administrateur de l’Office des Habitations à Bon Marché de la Seine ou le Rapporteur du budget et au Conseil général de la Seine. Inspiré des exemples britanniques, scandinaves, autrichiens et allemands, il défend la mise en place de cités-jardins24 et engage ses collègues dans une réflexion d’ensemble sur l’urbanisme et l’hygiène sociale.
Quelques exemples sont mis en avant, comme Villeurbanne sous le mandat de Lazare Goujon, grand maire constructeur dans un esprit moderniste, dans un climat de compétition avec le PCF, Toulouse avec Étienne Billières, ses cités populaires, sa bourse du travail rénovée, son parc des sports et sa grande bibliothèque25, ou bien tout aussi ouvert au modernisme Boulogne-Billancourt que gère André Morizet, ancien « insurrectionnel » de la SFIO, cofondateur du PCF, devenu un grand notable socialiste, président de son groupe sénatorial26. Châtenay-Malabry, administrée depuis 1925 par Jean Longuet, accueille la Cité-jardin de la Butte rouge, avec de nombreux équipements dont une des toutes premières piscines de banlieue, mais la ville échoue à obtenir les transports en commun initialement prévus pour sa desserte. Lors de la formulation du gouvernement de Front populaire, Léon Blum fait appel à l’expérience de nombreux maires : Roger Salengro (Lille), puis Marx Dormoy (Montluçon) à l’Intérieur, Vincent Auriol (Muret) aux Finances, Robert Jardillier (Dijon) aux PTT, Jean-Baptiste Lebas (Roubaix) au Travail, Henri Sellier (Suresnes) à la Santé publique, Charles Spinasse (Égletons) à l’Économie nationale, Henri Tasso (Marseille) à la Marine marchande et François Blancho (Saint-Nazaire) à la Marine de guerre. Conseiller municipal, Léo Lagrange (Avesnelles) est l’inspirateur de la politique municipale de sa petite ville. Paul Faure (Le Creusot), Albert Bedouce (Toulouse) et Georges Monnet (Celles-sur-Aisne) sont d’anciens maires. Seuls finalement parmi les socialistes Léon Blum, Jules Moch et Albert Rivière, conseiller général de Boussac, et bien sûr la non-électrice Suzanne Lacore sont dépourvus de cette expérience.
En tout cas, l’entre-deux-guerres reste une grande époque de réalisations sociales, sportives et culturelles qui vont définir et entretenir l’image du socialisme municipal. Elle est d’autant plus importante que nationalement, les socialistes sont éprouvés dans la recherche d’une voix spécifique, qui se veut socialiste mais toujours démocrate, républicaine et laïque mais toujours authentiquement populaire pour se distinguer à la fois du communisme et du radicalisme, tout en pratiquant l’union avec l’une ou l’autre de ses deux forces, ou après 1935 souvent les deux à la fois.
L’après-guerre ne dément pas cette réputation. Si nationalement les socialistes éprouvent des difficultés, surclassés par les communistes dès les premiers scrutins, se résolvant à une politique de troisième force critiquée par ces derniers comme par les gaullistes, s’affaiblissant peu à peu dans les scrutins nationaux, souvent divisés et très contestés après le gouvernement Guy Mollet (Suez, guerre d’Algérie avec envoi du contingent…) et le ralliement en 1958 à De Gaulle, le socialisme municipal conserve une allure solide avec Toulouse, Marseille reprise en 1947 par Gaston Defferre, Lille reprise en 1955 avec Augustin Laurent, Clermont-Ferrand, Limoges et de nombreuses autres villes. Dans le cadre d’alliances avec les centristes, et de combat contre les communistes, une tête de liste socialiste paraît souvent la meilleure option pour l’emporter ou pour gérer. L’heure est à la Reconstruction : Marseille se vante de construire 7 000 logements par an, Louis Bazerque à Toulouse fait construire Le Mirail. Un peu partout se multiplient colonies de vacances, constructions scolaires, équipements hospitaliers et foyers pour personnes âgées, mise en place de festivals culturel (dont celui d’Avignon), soutien aux théâtres…
Le modèle finit toutefois par vieillir, ou par se banaliser27, socialement, culturellement et politiquement. Après le congrès d’Épinay (1971), le parti socialiste de François Mitterrand préconise une stratégie d’union de la gauche, acceptée par la plupart des caciques de l’ancienne SFIO (Defferre à Marseille, Mauroy à Lille…), qui permet d’ailleurs la poursuite de la compétition sous d’autres formes. « L’union est un combat… » comme le dira le dirigeant communiste Étienne Fajon dans une conférence restée célèbre28. Pour les deux partis, les élections de 1977 marquent l’apogée de leur influence et de leurs succès municipaux.
De nouvelles préoccupations sont apparues dans le sillage des contestations des années 1960 et du rajeunissement de la société : cadre de vie, circulation, politique culturelle plus active et rajeunie, demandes de démocratie plus active, d’autogestion dit-on souvent à l’époque en milieu socialiste ou alternatif (le PCF parlant d’autonomie de gestion)… Elles ont été portées par de nouvelles équipes, ont coloré et soutenu la poussée à gauche globale qui se traduit nationalement, au-delà de diverses vicissitudes, par l’arrivée au pouvoir après 1981 de François Mitterrand et des socialistes, finalement réitérée pour quatre législatures (1981-1986, 1988-1993, 1997-2002, 2012-2017)… Un ouvrage de synthèse, complétant celui d’Aude Chamouard déjà évoqué, qui s’intéresse davantage à l’histoire politique, en privilégiant le bilan social et culturel de ces réalisations sous les Républiques successives serait évidemment hautement souhaitable d’autant qu’existent de plus en plus des études d’histoire locale ou régionale de grande qualité.
Et aujourd’hui ?
Ce socialisme municipal est-il aujourd’hui aussi flamboyant ? Plusieurs commentateurs ont parlé de son déclin, voire de sa mort après les difficiles élections de 2014. Le bilan que tente régulièrement de dresser des experts dans des rapports publiés par la Fondation Jean-Jaurès ou dans d’autres lieux reste pourtant contrasté, équilibré, au moins mitigé… Le socialisme municipal résiste même dans les grandes villes. Sur 42 villes de plus de 100 000 habitants, 24 sont gérées par la gauche, dont 15 socialistes, 7 écologistes et 2 communistes. Sur 270 villes de plus de 30 000 habitants, la droite est en revanche majoritaire avec 169 pour la droite et 101 pour la gauche, dont 47 socialistes, 9 écologistes, 15 communistes et une trentaine de divers gauche plus ou moins hésitants sur la ligne de partage avec la majorité présidentielle.
Les socialistes restent dominants à gauche dans les structures départementales (30 départements ont un président socialiste et 2 des radicaux de gauche) et régionales (4 régions métropolitaines) mais dans un contexte favorable à droite. Les élections de 2026 comme les suivantes pourraient cependant modifier cet état de choses avec une vaste et nouvelle offensive de la France insoumise, pratiquement absente des échelons locaux malgré des tentatives en 2020 : Faches-Thumesnil, Grabels, Piennes ne suffisant vraiment pas à en faire une force à cet échelon… Les écologistes ont gagné de très grandes villes (Lyon, Grenoble, Bordeaux, Besançon, Tours, Strasbourg…) mais sont nettement absents des autres échelons. Le communisme municipal concerne encore 256 villes de plus de mille habitants, et une présence souvent appréciée dans bien des villes de gauche dont témoigne l’élection épisodique de maires communistes dans des villes très nettement socialisantes (Sarcelles en 2018, Tulle…), mais ces effectifs ne représentent plus qu’un tiers de ceux obtenus en 1977.
De toute façon, il nous semble constater un double mouvement de dispersion et de rassemblement. Dispersion au niveau des étiquettes politiques : l’émergence des écologistes, en tout cas du parti portant ce nom ou celui de Verts, puisque PS comme PCF ou LFI prétendent se réclamer tout autant d’objectifs écologiques, est incontestable et durable. Les Insoumis n’ont pas encore démontré qu’ils pouvaient devenir une force municipale, mais de nombreux indices peuvent leur laisser espérer qu’il en ira autrement après 2026. Le poids des partis classiques, très affaibli, a de toute façon beaucoup diminué et explique le phénomène de regroupement.
Plutôt que de socialisme municipal, il faudrait parler désormais de gauche municipale, avec ses diversités, ses contradictions et ses ressemblances. Les contenus sont peut-être moins directement lisibles avec une gestion de plus en plus complexe et technique, des contraintes étatiques et gouvernementales visant à dépolitiser et à imposer des cadres plus stricts à l’ensemble des collectivités locales, comme Marie Jay l’a montré dans son intervention au cours de ces mêmes Journées de Mauprévoir. Le contrôle a toujours existé, peu ou prou. Mais il était plus simple jadis de comprendre ce qui appartenait aux choix des uns et des autres. C’est plus difficile, mais on y arrive…
Au fond, l’association de priorités sociales, culturelles et éducatives, avec un souci proclamé d’élargissement démocratique, se décline incessamment dans toute l’histoire du socialisme municipal, selon des modalités différentes et avec bien entendu son lot de réussites et d’échecs, de tentatives et de renoncements, de reprises aussi… La définition classique de « République indivisible, laïque, démocratique et sociale »29, qui est au fond des combats politiques de gauche demeure forte et inspirante, et sans doute surtout d’abord à l’échelon communal.
- Michel Offerlé, Les socialistes et Paris, 1881-1900. Des communards aux conseillers municipaux, 2 vol., thèse d’État, Paris 1, 1979. ↩︎
- Frédéric Sawicki, Les réseaux du Parti socialiste, Paris, Belin, 1997. ↩︎
- Rémy Lefebvre, Municipales : quels enjeux démocratiques ?, Paris, La Documentation française, 2020. ↩︎
- Maurice Agulhon, pour l’ensemble de son œuvre sur l’histoire républicaine, mais signalons particulièrement « La Mairie » in Les lieux de mémoires. 1. La République, Paris, Gallimard, 1984. ↩︎
- Directrice de thèse de Patrizia Dogliani. Voir aussi son article « Sur le municipalisme », Politique aujourd’hui n° 3-4, 1971. ↩︎
- Emmanuel Bellanger et Jacques Girault (dir.), Villes de banlieue, Grâne, Créaphis, 2008. ↩︎
- Jacqueline Lalouette, La Libre Pensée en France 1848-1914, Paris, Albin Michel, 1997. Voir aussi « Le citoyen Rosenthal, 4e adjoint » in Vincent Chambarlhac et alii, Léon Rosenthal, militant, critique, et historien d’art, Paris, Hermann, 2023. ↩︎
- Patrizia Dogliani, Le socialisme municipal en France et en Europe de la Commune à la Grande Guerre, Nancy, Arbre bleu éditions, 2018. ↩︎
- Aude Chamouard, Une autre histoire du socialisme. Les politiques à l’épreuve du terrain 1919-2010, Paris, CNRS Éditions, 2013. ↩︎
- C’est ce que j’ai essayé d’exposer rapidement dans Pourquoi la gauche ?, Paris, PUF, « Questions républicaines », 2022. ↩︎
- Du nom de l’ancien communard Jean Allemane, rétif à l’organisation guesdiste, antimilitariste et méfiant envers le parlementarisme, bien implanté notamment dans la Seine et dans les Ardennes, qui maintient un courant spécifique de 1890 à 1905, voire au-delà. ↩︎
- Paul Lafargue publie une série d’articles dans L’Humanité en décembre 1908-janvier et février 1909 publiés en brochure sous le titre M. Vautour et la réduction des loyers, Paris, Librairie du Parti socialiste, 1909. ↩︎
- Nicolas Delalande, Les batailles de l’impôt. Consentement et résistances de 1789 à nos jours, Paris, Seuil, 2014. ↩︎
- Se reporter en priorité à Emmanuel Jousse, Les hommes révoltés. Les origines intellectuelles du réformisme en France (1871-1917), Paris, Fayard, « Histoire », 2017. ↩︎
- Benoît Malon, Le nouveau parti, Paris, Derveaux, 1881, préface de Jules Vallès. ↩︎
- Édité par son journal Le Prolétaire, 1883 et 1910, republié avec une introduction de Bruno Antonini par Le Bord de l’eau (Lormont, 2011). ↩︎
- Jules Joffrin (1846-1890) est conseiller municipal des Grandes Carrières de 1882 à 1884 et de Clignancourt de 1886 à 1889. ↩︎
- Nathalie Droin, Aux origines du socialisme municipal : César de Paepe », Revue française d’histoire des idées politiques, n° 42, 12015/2, p. 167-198. ↩︎
- Adeline Blaszkiewicz-Maison, Albert Thomas 1878-1932. Une histoire du réformisme social, Paris, PUF, 2024. ↩︎
- Jaurès en recommande la lecture dans un article : « Les Cahiers du Socialiste » publié par la Revue de l’enseignement primaire et primaire supérieur, 6 juin 1909. Ils sont étudiés dans la thèse de Christophe Prochasson, dont est issu son livre Les intellectuels, le socialisme et la guerre, Paris, Seuil, 1993. ↩︎
- Voir la notice aussi dense que précise de Nathalie Viet-Depaule sur Georges Marrane dans le Maitron. ↩︎
- Bascule symbolique, l’ancienne circonscription de Vaillant élit en 1928 le communiste Jacques Duclos qui bat Léon Blum, député sortant et chef de file du socialisme parlementaire. ↩︎
- Roger-Henri Guerrand et Christine Moissinac, Henri Sellier, urbaniste et réformateur social, Paris, La Découverte, 2005. ↩︎
- Katherine Burlen (dir.), La Banlieue-oasis. Henri Sellier et les cités-jardins, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 1987. ↩︎
- Rémy Pech, 1925. Etienne Billières, un maire visionnaire au Capitole, Portet-sur-Garonne, Éditions midi-pyrénéennes, 2025. ↩︎
- Fabien Guillot, André Morizet, un maire constructeur dans le Grand Paris, 1876-1942, préface de Jacques Girault, Grâne, Créaphis, 2013. ↩︎
- Souvenir personnel : la municipalité conservatrice de ma ville de banlieue-sud refusa jusque tard dans les années 1960 l’ouverture d’une bibliothèque municipale, qui ne correspondait pas à un besoin selon le maire : les gens qui aimaient lire achetaient des livres, les autres ne souhaitaient pas de dépenses inutiles… ↩︎
- Étienne Fajon, L’union est un combat, Paris, Éditions sociales, 1975. ↩︎
- Ce début de l’article 1 de la Constitution de la République française dans la Constitution de 1958 comme dans la précédente de 1946 est largement connu. Accepté par tous les groupes de la Constituante, il émane à l’origine d’une proposition du communiste Étienne Fajon. Il nous semble convenir parfaitement à l’objectif commun de l’ensemble des gauches dans leur diversité comme nous avons essayé de le montrer dans Pourquoi la gauche ? de la Commune à nos jours, Paris, PUF, 2022. ↩︎
Image d’illustration : « Büste Christophe Thivrier in Commentry », photographie du 6 octobre 2019 par E-W (CC BY-SA 4.0)