Sahara occidental : la France, soutien du colonialisme


Par Noâm Korchi.

La « trêve politique » liée aux Jeux olympiques fût de courte durée pour le président sans majorité et sans gouvernement, Emmanuel Macron.

Ce mardi 30 juillet à l’occasion de la Fête du Trône du roi du Maroc Mohamed VI, le Président de la République a annoncé le soutien de la France aux revendications coloniales du Maroc sur le Sahara occidental, s’opposant ainsi aux résolutions – toutes mises en échec – de l’ONU sur la question du Sahara Occidental et de l’auto-détermination du peuple sahraoui.

Un référendum avait même été proposé suite au cessez-le feu de 1991, sans pour autant voir le jour. Ce processus démocratique est toujours aujourd’hui la revendication principale de la République arabe sahraouie démocratique. 

La position « intangible » d’Emmanuel Macron sur le sujet, prétendument fondée sur un pragmatisme politique et sur l’impossibilité d’aboutir à une solution satisfaisante pour tous, diverge également de celle de l’Union Européenne, qui défend une « solution juste, réaliste, pragmatique, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental ».

Le plan marocain soutenu par le président repose sur l’oxymore « autonomie sous souveraineté » : le Maroc conserve les compétences régaliennes et les ressources du territoire (notamment le phosphate, les ressources maritimes et le pétrole) et « offre » en échange un semblant d’autonomie budgétaire et fiscale au peuple sahraoui. Ce scénario acte également la fin d’une République démocratique au profit d’une monarchie, connue pour son autoritarisme et pour ses défauts de démocratie.

Profitant des adhésions successives de pays tels que les États-Unis, l’Espagne ou encore Israël au plan du régime autoritaire marocain, la France s’emploie elle aussi à faire primer ses intérêts économiques sur ceux d’un peuple colonisé en quête d’indépendance.  Si dans les faits cette position est loin d’être nouvelle (la France ayant largement participé à la colonisation du Sahara Occidental par le Maroc en 1976), la France avait jusque-là adopté des approches ambiguës, ne s’engageant pas frontalement contre le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui (et donc contre les résolutions de l’ONU et la position « neutre » de l’Union Européenne) et n’affichant pas clairement son soutien à la royauté marocaine et ses vues coloniales.

Peut-être nostalgique du « temps béni des colonies », Emmanuel Macron s’inscrit dans la droite ligne politique d’un régime français adepte de la Françafrique, au passé colonial encore bien ancré et coutumier des ingérences en Afrique. Plus navrant encore, cette décision n’a pas réjoui uniquement l’extrême-droite et le bloc libéral ; des élu·es de gauche ont aussi jugé bon d’afficher leur opposition à l’indépendance du peuple sahraoui et à la reconnaissance de la République arabe sahraouie démocratique.

N’oublions pas que le peuple marocain n’est pas unilatéralement aligné sur les positions du régime autoritaire qui le gouverne. La question de l’autodétermination du peuple sahraoui a valu bien des oppositions, et conduit à de nombreux emprisonnements dès l’indépendance du Maroc.

À travers la parole d’intellectuels marocains, de partis politiques comme la Voie Démocratique, ainsi qu’à travers de grands mouvements populaires dans tout le Maroc et particulièrement dans le Rif, l’opposition existe et continue de s’exprimer dans le pays. La légitimation d’une souveraineté marocaine sur le Sahara occidental passe donc, pour le roi, par la reconnaissance du plan marocain par d’autres pays, notamment les anciennes puissances coloniales, ainsi que par la répression.

C’est donc au nom de ces Marocain·es, de ces militant·es et du peuple sahraoui qu’il est important de faire vivre ce combat pour l’autodétermination et, plus largement, le combat pour une voie démocratique au Maroc.

Pour l’heure, il est nécessaire qu’un référendum d’autodétermination – une demande remontant à plus de trente ans – soit mis en place rapidement et que l’indépendance du peuple sahraoui ne tombe pas dans l’oubli.


Image d’illustration : « Sahara Occidental – Campamento 27 de febrero », photographie du 2 mai 2010 par Daniel Bobadilla (CC BY-NC-SA 2.0)


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