Caniveau, coup de force et réaction


Par Patrick Le Hyaric.

Cet article du 18 mai 2024 est extrait de la lettre hebdomadaire de Patrick Le Hyaric. Cliquez ici pour lire la lettre de la semaine et ici pour vous y abonner.

Chaque semaine qui passe, fait remonter les effluves de la bêtise politique, des coups de force, des tentatives d’embrumement des cerveaux au seul bénéfice des extrêmes droites.

Le sieur Ciotti, président du parti « les républicains » touche le fond au point que s’il continue de creuser, il va trouver des métaux rares. Voyons ! En une semaine, il fait tout pour qu’il n’y ait pas de groupe d’amitié France-Palestine à l’Assemblée nationale au prétexte que la Palestine n’est pas un État, il propose la dissolution de La France Insoumise tout en faisant les yeux doux à l’extrême droite. Tout ceci en se retrouvant une nouvelle fois au cœur d’une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics. On peut donc s’appeler « les Républicains » même quand la République vous quitte !

Pendant ce temps-là, la guerre fait rage à l’Est de l’Europe sans prémices de solution diplomatique. Le pouvoir israélien écrase de son talon de fer lesté des armes occidentales le peuple de Gaza alors que le Hamas se reconstitue au Nord de l’enclave. Biden avait menacé de ne plus fournir d’armes, mais il fait voter un crédit d’un milliard de dollars pour livrer Israël en nouveaux engins de mort. La mobilisation pour la justice et la paix, pour obtenir un cessez-le-feu, la libération des otages israéliens et celle de prisonniers Palestiniens et la reconnaissance d’un État palestinien se poursuit et s’amplifie (voir la chronique de Francis Wurtz dans l’Humanité Magazine).

Aveuglé par les phares de la colonisation, M. Darmanin voit dans le climat insurrectionnel en Nouvelle-Calédonie la main de l’Azerbaïdjan. C’est que notre ministre de l’Intérieur voit loin. Et il n’a pas besoin de nous fournir une seule preuve. Cela justifie donc qu’il mette de l’huile sur le feu sur un territoire dont il faut rappeler qu’il se situe à 17 000 kilomètres de son ministère et de l’Élysée. Il veut faire oublier que cette terre a été arrachée aux Kanaks en 1853 pour installer un bout de France dans le pacifique. C’est même sur cette terre qu’en 1863 étaient déportés au bagne les Communards. Pour nos gouvernants, l’histoire n’existe pas. La colonisation est un mot interdit. La soumission du peuple Kanak, de sa culture, la spoliation de ses terres par des colons blancs, le droit de vote acquis seulement en 1957 sont effacés des émissions de télévision. La grande pauvreté, le haut niveau de chômage en Kanaky aussi.

Jusqu’au vocabulaire, on méprise les Kanaks en parlant de « loyalistes » alors qu’eux seraient indépendantistes quand ils ne demandent que le droit au respect, à la souveraineté et à vivre en commun avec toutes les populations. « Loyalistes » ? Mais alors que le pouvoir respecte la totalité des accords de Nouméa et n’agisse pas en force pour modifier le corps électoral. Il n’y a pas d’autre solution désormais que de nommer un vrai groupe de médiation incontesté, accepté par tous pour entamer des discussions et faire cesser les violences. (voir ici l’Humanité du 15 mai et celle du 16 mai, voir aussi l’article de Hadrien Bortot sur Nos révolutions).

Curieux que les stratèges gouvernementaux ne s’aperçoivent pas que plus ils imposent leur tempo de la campagne électorale de leur première de liste aux élections européennes, et plus ils l’enfoncent. Ils ne se rendent pas compte du haut niveau de rejet à leur égard y compris de la part de leurs électrices et électeurs du premier tour de l’élection présidentielle. Mieux, conformément à la ligne macroniste, il a été décidé de faire de l’extrême-droite le seul interlocuteur, la seule alternative. C’est le sens des débats voulus avec insistance entre Attal et Bardella.

Comme si cela ne suffisait pas, le président de la République prie Mme Le Pen pour faire un débat avec lui. Alors qu’aux Pays-Bas, s’installe un gouvernement dirigé par l’extrême-droite dans lequel siégera le parti centriste, ici Macron lui prépare activement le terrain. Dans un tel contexte général, les petites phrases assassines entre dirigeants et candidats de gauche relèvent d’une désespérante irresponsabilité. Alors que chaque liste de gauche devrait déployer un immense travail pour mobiliser les abstentionnistes progressistes, les venimeuses querelles et les cytotoxiques anathèmes ne font qu’entretenir cette abstention et le désespoir. Exactement ce que cherchent les fondés de pouvoir du grand capital.

Il ne reste que quelques jours pour se ressaisir, pour placer les enjeux d’une transformation profonde de la construction européenne au cœur des débats : sortie des pactes d’austérité, salaire minimum partout et fin de la mise en concurrence des travailleurs pour relever tous les salaires dans l’Union Européenne, égalité femmes/hommes avec statut de la femme la plus « favorisée » au sein de l’Union, transformation de la Banque centrale pour déployer en grand des services publics permettant la transition environnementale et outil d’amélioration du pouvoir d’achat, transformation de la PAC en une politique agroécologique et alimentaire visant le droit à une alimentation de qualité pour toutes et tous, non-alignement de l’Union sur les États-Unis et l’OTAN pour lui permettre de jouer un rôle actif pour la prévention des conflits, le désarmement, la coopération et paix, déploiement d’une nouvelle politique de coopération pour le codéveloppement avec les peuples et pays du Sud…

Proposition et processus d’élaboration d’un nouveau traité pour une autre Europe : union des peuples et des nations associées, libres, solidaires, souveraines, tournant le dos à l’unicité des politiques économiques au service du grand capital. Une nouvelle union mariant le progrès social, écologique et démocratique. Bref, l’heure est à défricher un véritable processus communiste unitaire pour construire une nouvelle Europe des peuples, par les peuples eux-mêmes.


Image d’illustration : CC-BY-4.0 : © European Union 2024 – Source : EP


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