La fachosphère déchaînée contre Aya Nakamura


Par Patrick Le Hyaric.

Cet article du 16 mars 2024 est extrait de la lettre hebdomadaire de Patrick Le Hyaric. Cliquez ici pour lire la lettre de la semaine et ici pour vous y abonner.

Le magazine l’Express a laissé filtrer il y a quelques jours une information selon laquelle, les organisateurs des jeux Olympiques et la présidence de la République aurait contacté la chanteuse Aya Nakamura pour lui proposer de se produire lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques l’été prochain. Il lui aurait été même proposé d’interpréter une chanson d’Édith Piaf.

Ce ne serait pas un mauvais choix que de faire s’exprimer la voix francophone la plus écoutée à l’étranger. En quatre albums elle s’est imposée dans le paysage musical. Venue de Bamako, elle a grandi en Seine Saint-Denis à Aulnay-sous-Bois. Elle est capable aujourd’hui de remplir deux fois la grande salle de Bercy en un quart d’heure, si bien qu’une troisième date a été ajoutée afin que celles et ceux qui veulent assister à son concert puissent le faire. Nous avons eu le plaisir de l’accueillir à La Fête de L’Humanité. Ses chansons et sa musique dévoilent une multitude d’influences musicales, du Zouk au R&B, ou de l’afrobeat au Hip Hop. Tous les spécialistes louent sa créativité, le côté festif de ses textes et ses détournements ou ses réinventions de la langue française.

Mais voilà que l’extrême-droite et ses relais médiatiques sont partis en guerre contre ce projet et contre la chanteuse. Un groupuscule de cette extrême droite fascisante a déployé une banderole raciste, le 9 mars dernier sur les bords de Seine où était inscrit : « Y’a pas moyen Aya, ici c’est Paris, pas le marché de Bamako » et les chaînes d’information en continu, les journaux d’extrême droite crachent depuis plusieurs jours des propos aussi abjects que rances ou se marient misogynie et racisme. Là, le Premier ministre ne s’est pas déplacé pour faire une leçon prétendument d’instruction civique et les claviers des machines à écrire de l’Élysée sont restés muets. Et, le multi-condamné Zemmour pour provocation à la haine raciale s’est surpassé en expliquant que la musique appréciée par les bébés in utero n’est « ni le rap, ni la lambada, ni Aya Nakamura, mais Mozart ». On se demande jusqu’où iront ces proto-fascistes sans réplique.

Si Aya Nakamura chante Piaf, elle aura au moins un point commun avec elle : Piaf aussi en son temps a été critiquée sur ses interprétations, son physique ou ses mœurs.

Ce qui est contesté à nouveau par ces abjectes attaques contre l’une de nos chanteuses mondialement connues et appréciées est la participation pleine et entière des personnes – qu’ils soient ouvriers ou créateurs – issues de l’immigration, Françaises ou pas, à l’enrichissement de notre pays, à la culture française, à l’enrichissement de la langue et des modes d’expression. La fachosphère puante de la haine de l’autre a déclaré la guerre à cela. Elle combat tout ce qui émane de la culture urbaine et immigrée alors qu’Aya Nakamura est aujourd’hui, une artiste universelle.

À l’opposée, nous considérons qu’elle est l’une des fiertés pour la Seine Saint-Denis, et de la France de demain loin des conservatismes, des dominations, des exploitations et du repli sur soi. L’émancipation et le respect mutuel sont des combats continus. Les enseignants de sa ville d’Aulnay-Sous-Bois sont d’ailleurs en ce moment en pointe du combat pour un plan d’urgence pour l’école en Seine Saint-Denis.

Ni le gouvernement ni la fachosphère ne s’en préoccupent. Loin des harangueurs de têtes brûlées, emplies de haine comme ce Guillaume Peltier, qui hier était vice-président de LR, devenu partisan de Zemmour saluant dimanche dernier lors du meeting de son parti, ses militants « qui ont compris qu’il y a plus grave que le pouvoir d’achat et le réchauffement climatique ; l’enjeu est de sauver la France du grand remplacement islamique » quand son chef criait quelques minutes plus tard que ce qui menace aujourd’hui l’Europe « c’est l’enfant de Staline et de Mahomet : l’islamo-gauchisme ».

Mesure-t-on partout le niveau de haine atteint ? Apprécie-t-on à sa juste et grave mesure les basculements en cours ? Dans les belles chaumières et les yachts où logent les maîtres du monde, on se réjouit. De tels discours constituent pour eux une belle assurance tous risques pour l’avenir. C’est la raison pour laquelle on travaille dur dans les centres de réflexion du capital pour faire basculer la France dans un nouveau système politique empêchant toute transformation progressiste.


Image d’illustration : Paris 2024 place du Trocadéro, par Nicolas Michaud (CC BY-NC-ND 2.0)


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