En Amérique latine, faire la paix avec les drogues ? Un enjeu de sécurité humaine globale


Par Juan Francisco Cohu.

« Qu’est ce qui est le plus toxique pour les êtres humains ? La cocaïne ? Ou le charbon ? Ou le pétrole ? (…) Les diktats du pouvoir mondial ont ordonné que la cocaïne soit le poison et qu’elle soit sanctionnée même si elle n’est à l’origine que d’un nombre minime de morts par overdose et davantage compte tenu des mélanges provoqués du fait de son statut clandestin. En revanche, le charbon et le pétrole se doivent d’être protégés afin que leur utilisation puisse venir à bout de toute l’humanité. (…) Les capitalistes et les ultra-libéraux voient dans l’exubérance de la forêt, dans sa vitalité quelque chose de l’ordre du péché, l’origine coupable de la tristesse de leurs sociétés ancrées dans la compulsion profonde et illimitée de posséder et de consommer. Selon le pouvoir absurde du monde, ce n’est pas la faute du marché qui ronge l’existence, c’est la faute de la forêt et de ceux qui l’habitent1

C’est par ces mots que Gustavo Petro Urrego, premier président de gauche de l’histoire de la Colombie, commençait son vibrant discours devant l’Assemblée générale des Nations unies, le 20 septembre 2022. Il y appelait à la fin de la « guerre contre les drogues », débutée en 1971, par le président états-unien Richard Nixon.

L’objectif historique de la politique nord-américaine remonte à l’ère progressiste2 et, plus précisément, à la loi Harrison dite de « taxation des narcotiques » de 1914. Il s’agit de « combattre la drogue à la source ». Le principal impact de cette politique antidrogue, facilement observable, a été à la fois de « gonfler » et d’éparpiller3, depuis les années 1980, les circuits de la drogue dans l’ensemble du sous-continent sud-américain. Cette politique a également contribué au perfectionnement technologique des narcotrafiquants, améliorant ainsi leur rendement et contribuant de facto à leur enrichissement. Les pressions étasuniennes pour endiguer le trafic, combinées à la puissance financière des narcotrafiquants, ont conduit au délitement progressif de l’État de droit dans les pays andins ainsi que dans plusieurs pays d’Amérique centrale.

Cette guerre contre les drogues a également eu pour conséquence de diminuer les prix de la cocaïne, favorisant ainsi l’abus de cette drogue en la rendant accessible à tous et, surtout, aux plus pauvres. Outre les violations des droits humains provoqués dans les territoires où cette politique répressive s’applique encore aujourd’hui, l’économie illicite de la cocaïne contribue, enfin, à la disparition d’écosystèmes et creuse un peu plus le désastre écologique contemporain.

Dans ce contexte, il est frappant de noter qu’en Amérique du Sud, une des seules régions au monde où la gauche connaît aujourd’hui des victoires spectaculaires et où le trafic de drogue sévit avec intensité depuis des décennies, plusieurs dirigeants politiques appellent à une réforme internationale du contrôle des drogues. Pourtant en France, la classe politique, y compris une grande partie de la gauche, continuent à défendre un système archaïque, inefficace et contre-productif, fondé sur la doctrine de la prohibition forgée aux États-Unis.

La cocaïne : de son interdiction, à son trafic jusqu’à son « débordement »

Dans les années 1970, le président nord-américain R. Nixon déclare la guerre aux stupéfiants et son successeur, R. Reagan, l’étend aux paysans et producteurs de coca andins dans les années 1980. Maintes contradictions, manques de logique et d’efficacité peuvent venir décrire cette guerre menée contre la région des Andes. Le bilan de ces soixante années de guerre contre la drogue nous apprend comment l’octroi de moyens supplémentaires à la chaîne pénale pour endiguer le trafic illicite constitue une lourde erreur politique, et qu’il est absolument nécessaire de réfléchir à une réforme allant vers une réglementation des drogues.

Dans le sous-continent sud-américain se trouvent les trois principaux pays producteurs de cocaïne du monde : la Colombie, le Pérou et la Bolivie. Les pays producteurs de cocaïne ont en commun la culture andine, où le cocaïer (ou coca) est l’une des plus anciennes plantes domestiquées. Cet arbuste a d’abord fait l’objet de la convoitise des pays occidentaux lorsqu’on découvre au xixe siècle son alcaloïde, la cocaïne. Du xixe au xxe siècle, la cocaïne légale constituait une denrée prisée pour son rôle dans l’industrie pharmaceutique, mais également dans l’élaboration de boissons, comme le Coca-Cola, hautement addictives du fait de la présence de sucre. Rapidement, la feuille de coca a représenté une ressource dont le Pérou et les États-Unis sont disputé le monopole ; ces derniers souhaitant se prémunir, au bénéfice de leur firme Coca-Cola et de leur industrie pharmaceutique, de la volatilité du cours du produit. Par ailleurs, du côté des pays producteurs, l’exploitation et l’exportation des feuilles de coca représentaient un enjeu de développement industriel. C’est dans ce contexte qu’ au cours des années 1920, les États-Unis militent pour une réglementation du marché afin de s’assurer l’approvisionnement constant de leurs firmes et non d’une prohibition stricte.

Dans le même temps, une dynamique prohibitive initiée par les États-Unis, de 1931 à 1953, va s’exprimer à travers la signature de six conventions internationales. Elles viseront au renforcement du contrôle des drogues par l’interdiction de leur usage et par la répression de leur vente. Pour autant, ces conventions n’empêcheront ni la production, ni la consommation, ni la propagation mondiale de la cocaïne à partir des années 1960. La convention unique sur les stupéfiants4 (1961), sous l’égide de l’Onu, sera élaborée dans ce contexte et durcira le système de contrôle des drogues avec, notamment, la conditionnalité du commerce de la feuille de coca à un délai de 25 ans à compter de la promulgation du texte. La convention unique fut ensuite révisée par la convention sur les substances psychotrope5 (1971), puis par la convention contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes6 (1988), toutes impulsées à l’Onu par les États-Unis.

Précisons ici que jusqu’à la fin du xxe siècle le Coca-Cola d’origine contenait encore des extraits de feuilles de coca. Le Bureau fédéral des narcotiques (en anglais, FBN) fera en sorte de protéger les intérêts de la firme américaine, quitte à entretenir avec le Pérou une diplomatie floue dont la preuve la plus manifeste réside dans ce moratoire de 25 années avant l’interdiction du commerce des feuilles de coca. La stratégie états-unienne fut de laisser un minimum de temps à la firme Coca-Cola pour trouver une formule sans feuille de coca ; cela débouchera sur le « New Coke » 19857. Ainsi, comme le rappelle la chercheuse Marie-Esther Lacuisse (2011)8, la convention unique de 1961 visait en particulier l’interdiction de l’opium tandis que la feuille de coca, dont la mention a été ajoutée à la demande des États-Unis, relevait davantage d’un « régime transitoire ». L’interdiction des plantes stupéfiantes constituait des enjeux géopolitiques différents en en fonction de la zone concernée. En effet, si les pays andins sont des États indépendants depuis le xixe siècle, les pays asiatiques, cultivant des pavots d’opium, faisaient l’objet quant à eux d’une décolonisation plus ou moins conflictuelle au moment de la signature du texte. Le contrôle de la culture de plantes au potentiel psychotrope ou psychédélique, particulièrement rentables, dans ces pays a permis le maintien de la domination des anciennes puissances coloniales sur les économies nationales. Cependant, les tensions croissantes entre les deux blocs (Est et Ouest) interviendront rapidement dans les stratégies, notamment états-unienne en Amérique latine.

Une lutte à double vitesse des États-Unis contre la drogue

La « guerre contre la drogue » a constitué et constitue toujours l’une des épines dorsales de la stratégie d’ingérence de la part des États-Unis dont le processus dit « d’accréditation » semble être sa matérialisation la plus tangible. Mis en application par le biais de la loi contre l’abus de drogues datant de 1988, ce processus permet de conditionner les aides économiques et militaires nord-américaines au respect de certains critères et objectifs, définis unilatéralement par les États-Unis. L’Exécutif américain « accrédite » un État lorsqu’il juge la coopération de ce dernier satisfaisante. La liste des pays « accrédités » est ensuite transmise au Congrès qui a le pouvoir de contester l’accréditation. En cas d’absence ou d’annulation de celle-ci, la législation nord-américaine impose une réduction de 50 % de l’aide économique qui est accordée chaque année au dit État. De plus, les lois fédérales (Public Law) de la 92e législature du Congrès (PL 92-246 et PL 92-247) lient le processus d’accréditation au vote des États-Unis à la Banque mondiale et à la Banque interaméricaine de développement (acronyme anglais, IBD9), et peuvent ainsi bloquer le versement de fonds au pays visé. Les éléments d’analyse utilisés par l’administration états-unienne semblent être plutôt de nature politique que pratique.

Cela a conduit à la mise en œuvre d’une diplomatie à double vitesse de la part des États-Unis vis-à-vis des pays producteurs de coca, comme l’a mis en exergue le chercheur Juan G. Tokaltian10. D’un côté, des pays comme Cuba, l’Afghanistan ou encore la Syrie, cumulant en plus de la menace du trafic de drogue, un danger de terrorisme ou une influence soviétique durant la guerre froide11 ne se verront pas accorder les mêmes égards que, de l’autre, des pays comme la Turquie ou le Pakistan, alliés des États-Unis dans leur lutte anticommuniste et dont l’implication dans le trafic de drogue sera par conséquent tolérée. Cette politique est révélatrice du partenariat inégal imposé par cette « guerre contre la drogue » avec laquelle les États Unis traitent arbitrairement des pays, via le processus d’« accréditation », et au moyen de laquelle ils appauvrissent , ou maintiennent dans la pauvreté, des populations entières.

Cette stratégie anti-drogue, définie dans les conventions citées plus haut, a notamment pour objectif d’éradiquer les cultures de feuilles de coca. Le Pérou et la Bolivie (et seulement à partir de 2008, pour cette dernière) peuvent cultiver un volume limité de feuilles de coca, destiné aux usages traditionnels populaires. La consommation locale de la coca est donc limitée à ces deux pays et son exportation est illégale. Cela a pour conséquence directe le manque de débouchés sur les marchés licites pour les paysans qui exploitent le cocaïer sur des terres où aucune autre plante ne pousse avec un rendement aussi important. C’est dans ce contexte que les feuilles de coca tombent en grande majorité aux mains des narcotrafiquants.

Faire la paix avec les drogues : un chemin d’indépendance pour l’Amérique du Sud ?

Progressivement, les dirigeants politiques andins ont affirmé leur indépendance vis-à-vis de la politique anti-drogue dictée par des agences internationales, phagocytées par les États-Unis.

Le premier pays à s’en détacher est la Bolivie d’Evo Morales qui, en 2008, expulse les agents de l’agence américaine de lutte antidrogue, la Drug Enforcement Agency (DEA) et qui décide de se retirer de la convention unique de 1961 pour la signer, de nouveau, avec une clause nouvelle autorisant la population bolivienne à consommer de la feuille de coca. Depuis ce moment, la Bolivie lutte au sein des agences internationales pour pouvoir industrialiser et exporter la feuille de coca afin de donner une issue licite à la production de celle-ci. Les gouvernements de gauche boliviens successifs demandent notamment que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) reclassifie la feuille de coca et que celle-ci ne soit plus considérée comme un stupéfiant. Déjà, au milieu des années 1990, l’OMS avait lancé, à la demande du Pérou et de la Bolivie, une étude sur la toxicologie de la feuille de coca qui en avait conclu que la plante était sans effets négatifs sur la santé publique. Les États-Unis firent pression pour que ces résultats ne soient pas publiés. Ce n’est qu’en 2009, que cette étude fut publiée par l’institut de recherche, Transnational Institute12.

Plus récemment, l’ancien président péruvien de gauche Pedro Castillo, (destitué depuis par une majorité de parlementaires conservateurs), a refusé durant son mandat (2021-2022) de poursuivre la politique imposée par Washington pour se tourner vers la position bolivienne afin d’engager un dialogue avec les agriculteurs de feuilles de coca plutôt que de leur imposer la destruction de leurs cultures.

Du côté de la Colombie, le président Gustavo Petro Urrego envisage aujourd’hui dans son programme gouvernemental de substituer au « paradigme de guerre contre la drogue » celui de « régulation » en lançant un débat dans le pays centré sur la dépénalisation de la culture du coca. Par la voix de son ministre de la justice, il a ainsi averti que s’il n’envisageait pas de légaliser la cocaïne, il s’agirait de dépénaliser la plantation de feuilles de coca et de protéger les agriculteurs d’une approche qui les criminalise.

***

Cette dynamique sud-américaine est la bienvenue pour quiconque espère combattre durablement le trafic de drogue. La « guerre contre la drogue » engagée par les États-Unis, depuis près de 60 ans, n’a pas « éradiqué » la production, le trafic ni la consommation de stupéfiants, tout au contraire13. Il est permis d’y voir là au mieux une erreur stratégique certaine, au pire une hypocrisie monumentale.

Les prises de positions courageuses des chefs d’État tel Gustavo Petro Urrego, actuel président de Colombie, rongée depuis des décennies par l’emprise des barons de la drogue, appellent à mettre fin à plus d’un demi-siècle de contraintes, de militarisation et d’universalité des mesures antidrogue. Ces choix pointent aussi, et dénoncent, le monopole des États-Unis, tant dans les actions instituantes (au sein des agences internationales) que dans les actions normatives (dans l’application des lois américaines et de leurs implications internationales par exemple avec le processus d’accréditation) dans l’élaboration de cette prohibition.

Cette monopolisation a contribué à la diffusion de préjugés dont il est encore aujourd’hui difficile de s’extirper. Cela est passé par l’invention du terme de « narcoterrorisme » par les États-Unis afin d’associer les guérillas communistes latino-américaines à l’industrie de la drogue dans le but de donner une motivation politique au trafic illicite. Ensuite, par les considérations puritaines et religieuses américaines qui ne voient dans la consommation de drogue qu’un enjeu moral plutôt qu’un enjeu de santé publique. Enfin, par l’arsenal législatif et policier tant dans les pays producteurs que consommateurs, qui ont eu un impact disproportionné sur les personnes précaires, les migrants, les femmes, les homosexuels et les personnes racisées14. La « guerre contre la drogue » conçue et imposée par Washington se révèle, comme sa « guerre (internationale) contre le terrorisme » émaillée de victoires à la Pyrrhus. Peut-être est-il temps désormais d’en convenir et, effectivement, « changer de paradigme » comme nous y invite la Colombie.


  1. Pour voir l’intervention complète : Discours de Gustavo Petro Urrego, AGONU, 20 septembre 2022. ↩︎
  2. C’est une période de l’histoire des États-Unis qui s’étend des années 1890 aux années 1920. Elle est caractérisée par des réformes économiques, politiques, sociales et morales dont les années de présidence de Theodore Roosevelt (1901-1909) marquent l’apogée. ↩︎
  3. C’est ce que l’on appelle l’« effet ballon » désignant le fait que lorsque les fabricants, les trafiquants et les vendeurs de drogue se voient empêchés par les autorités de mener leurs opérations dans une région donnée, ils se contentent d’aller s’installer ailleurs. Ce déplacement ne représente qu’un désagrément temporaire pour les participants. ↩︎
  4. Cette convention est dite unique car elle remplace plusieurs conventions internationales.  Son objectif est de limiter la production et le commerce de substances interdites en établissant une liste de ces substances, qualifiées de stupéfiants. ↩︎
  5. Lire : https://www.unodc.org/unodc/fr/treaties/psychotropics.html. ↩︎
  6. Lire : https://www.unodc.org/unodc/fr/treaties/illicit-trafficking.html. ↩︎
  7. Le New-coke fait référence à la nouvelle formule pour la boisson de coca-cola dans un contexte où la firme Coca-cola voyait la part de sa boisson diminuer au profit de celle de Pepsi. En dehors des considérations de guerre marketing entre les deux firmes, Coca-Cola n’a jamais reconnu publiquement que cette nouvelle recette avait également pour objectif de se débarrasser de la feuille de coca. En effet, à la même période la détermination de Reagan de vouloir éradiquer les plantations de coca en Amérique du Sud faisait craindre aux dirigeants de la firme Coca-Cola des problèmes d’approvisionnement de la plante.  Voir : Mark Pendergrast, For God, country and Coca-Cola : the definitive history of the great American soft drink and the company that makes it, New York, Basic Books, 3e ed. 2013, chapitres 16 à 19. ↩︎
  8. Marie-Esther Lacuisse. « Les 50 ans de la Convention unique sur les stupéfiants : du contrôle d’un marché légal à la problématique du narcotrafic », Les études du Ceri, Political Outlook de l’Opalc,  no 179-180, 2011,p. 84. ↩︎
  9. Site en français : https://www.iadb.org/fr. ↩︎
  10. Journal of Interamerican Studies and World Affairs, Vol. 30, No. 1 (Spring, 1988), pp. 133-160, Juan G. To- katlian. ↩︎
  11. Rachel Ehrenfeld, « Narco-Terrorism: The Kremlin Connection », The Heritage Foundation, 28 janvier 1987 : https://www.heritage.org/europe/report/narco-terrorism-the-kremlin-connection. ↩︎
  12. En effet, une fois les résultats portés à la connaissance des délégués des états membres, les représentants des états-unis se sont opposés à la publication de l’étude car, selon l’un des représentants à l’assemblée mondiale de la santé, le projet « va dans le mauvais sens (…) il sape les efforts de la communauté internationale pour éradiquer la culture et la production illégales de coca ». Le délégué des états-unis a clarifié encore la position de son pays : « si les activités de l’OMS ne font rien pour renforcer les méthodes éprouvées de contrôle des drogues, le financement des programmes concernés sera réduit ». Cette intervention politique dans la recherche scientifique a signifié la fin du projet, les procédures subséquentes n’ont jamais été conduites et les résultats complets de ses travaux jamais publiés ». Voir : https://www.tni.org/es/publicacion/propuesta-de-enmienda-de-boli-via-al-convencion-unica-de-1961-sobre-estupefacientes ; https://www.globalcommissionondrugs.org/wp-content/uploads/2019/06/2019Report_FR_web.pdf. ↩︎
  13. https://www.areion24.news/2019/12/19/trafic-de-drogue-enjeux-et-evolutions-dun-phenomene-globalise/. ↩︎
  14. Kasia Malinowska, Olga Rychkova, « Getting Drug Policy Right for Women and Girls », Open Society Foundations :https://www.opensocietyfoundations.org/voices/getting-drug-policy-right-women-and-girls ; A Tale of Two Countries: Racially Targeted Arrests in the Era of Marijuana Reform | American Civil Liberties Union (aclu.org). ↩︎

Image d’illustration : Compte YouTube de la Présidence de la République de Colombie


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